La Médaille de Sainte-Hélène en Belgique.
par Jacques Declercq
Article publié dans la Revue de la Société
Belge d'Etudes Napoléoniennes, n° 78 et 79; 1972.
 

Le 12 août 1857, Napoléon III, Empereur des Français, instaurait la Médaille commémorative des campagnes de 1792 à 1815.

"Napoléon, 

Par la grâce de Dieu et la volonté nationale, Empereur des Français, à tous, présents et à venir, salut.
Voulant honorer par une distinction spéciale les militaires français et étrangers des armées de terre ou de mer qui ont combattu sous nos drapeaux de 1792 à 1815,
avons décrété et décrétons ce qui suit:
Art. 1: Une Médaille commémorative est donnée à tous les militaires français et étrangers des armées de terre ou de mer qui ont combattu sous nos drapeaux de 1792 à 1815.
Cette médaille sera en bronze et portera d'un côté l'effigie de l'Empereur, de l'autre, pour légende: Campagnes de 1792 à 1815 - A ses compagnons de gloire sa dernière pensée. Sainte-Hélène le 5 mai 1821.
Elle sera portée à un ruban vert et rouge, suspendue à la boutonnière.
Art.2: Notre Ministre d'Etat et le Grand Chancelier de notre Ordre impérial de la Légion d'Honneur sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret.
Fait au Palais de Saint-Cloud, le 12 août 1857.

Napoléon.

Par l'Empereur,
Le Ministre d'Etat.
Achille Fould
 

Quelques jours plus tard, le Moniteur de l'Armée signale que la médaille sera décernée quelle que soit la durée des services.

On peut à première vue se demander pourquoi, quarante-deux ans après la fin de l'épopée, Napoléon III éprouve le besoin de créer une telle distinction. Il faut avant tout se rendre compte du développement de la légende napoléonienne, surtout après la mort de Napoléon, grâce à des écrivains, à des artistes:

On parlera de sa gloire
Sous le chaume, bien longtemps.

 

Dans bien des demeures, on peut alors voir des lithographies, des images d'Epinal retraçant l'épopée. On parle du Petit Caporal depuis Corfou où des cierges brûlent devant son image, jusque chez les Incas de Patagonie.

L'opinion publique ne peut oublier les jours de gloire. L'empereur le sait.

Certains ont dit que la création de cette médaille n'était qu'un moyen pour lui de rallier le peuple à sa cause, de trouver des agents de propagande.

Le décret du 12 août peut aussi s'expliquer par le testament de l'Oncle: "… Je lègue mon domaine privé, moitié aux officiers et soldats qui restent des armées françaises qui ont combattu de 1792 à 1815 pour l'indépendance et la gloire de la Nation, …" (Longwood, 15 avril 1821).

Trente deux mille anciens soldats de l'Empire (dont beaucoup d'étrangers) avaient réclamé leur part de cet héritage illustre. Parmi eux, il y avait huit mille belges. Rappelons ici que 175.000 de nos compatriotes servirent dans les armées de la République et de l'Empire.

La Commission chargée de la répartition de ces legs décida de choisir parmi eux 500 des plus méritants, qui recevraient chacun 400 francs. Ainsi, cent quarante quatre Belges purent se dire héritiers de l'Empereur. Mais les autres? Les milliers d'autres qui, riches ou pauvres, avaient survécu: que leur donnerait-on?

Pour les dédommager et pour honorer tous ces braves, la moindre chose que l'on pouvait faire encore, c'était bien de leur accorder une distinction spéciale qu'eux seuls pourraient porter.

Ainsi, les vieux de la vieille et tous les grognards qui pleurent depuis trente-six ans la mort de leur Empereur se sentirent rajeunir de plusieurs lustres à la nouvelle de ce décret qui décorait en bloc tous les membres des sociétés d'anciens frères d'armes de l'Empire. Personne n'aurait plus rien à se reprocher désormais; et tous les grades, tous les services allaient se confondre dans une même distinction.

Napoléon III s'en est expliqué lors de l'ouverture de la session législative de 1858:

"J'ai voulu qu'une médaille vienne rappeler à tous ceux qui avaient servi dans nos armées la dernière pensée de leur chef. Plus de 300.000 hommes, en France et à l'étranger, ont demandé cette médaille, souvenir de l'épopée impériale et en la recevant, ils ont pu se dire avec fierté: Et moi aussi, je faisais partie de la Grande Armée, paroles que l'Empereur, à Austerlitz, avait raison de leur montrer comme un titre de noblesse."

Le décret impérial fut accueilli de façons très diverses; L'approbation fut grande, mais des critiques s'élevèrent également. Le 15 août, à Tournai, la Société des Frères d'Armes de l'Empire fêtait la Saint-Napoléon par un banquet au Café du Parc, dans l'ordre le plus parfait et la plus franche gaieté. Un toast très applaudi fut porté à la santé du Roi Léopold, un autre à celle du président, le colonel Stiénon. Enfin, un membre, J. B. Delcourt, prit la parole en ces termes: "Frères d'Armes, l'Empereur Napoléon, que nous avons tous servi, a consacré sa dernière pensée à ses compagnons de gloire; son noble neveu, l'illustre souverain qui gouverne aujourd'hui la France, a hérité du grand homme ses sympathies pour les soldats qui ont combattu glorieusement sous les drapeaux français. Napoléon III vient de donner une nouvelle preuve de son amour pour ceux qui restent de la Grande Armée. Il vient, par un récent décret impérial de décider qu'une médaille commémorative serait remise à tous les militaires français et étrangers qui ont combattu sous le drapeau de la France de 1792 à 1815. Frères d'armes, comme moi, vous serez reconnaissants de cette nouvelle marque d'attachement de ce généreux souverain, et à sa prospérité! Vive Napoléon III."

La Nouvelle Gazette de Prusse se plaint du bon accueil réservé en Hesse Rhénane à la Médaille de Sainte-Hélène. Elle signale la présence de sociétés de Vétérans qui "caressent les souvenirs du Premier Empire et s'affublent de ses oripeaux".

En France, cette médaille est nommée Médaille de chocolat, ou encore contremarque du Père Lachaise.

En Belgique, plus tard, Félicien Rops dédie un pamphlet à Messieurs les membres de la Société numismatique belge dans lequel il réfute les éléments de base de la légende napoléonienne. Cet opuscule contient en outre la reproduction d'une médaille dont voici le texte: "Médaille de Waterloo. Du dernier des chauvins voilà tout ce qui reste. A ses compagnons de raclée, sa dernière parole, signé Cambronne. Revers de la Médaille. 15 juin 1815."

L'organe républicain flamand Broedermin mène une campagne de presse contre la Médaille. Le Nouvelliste de Gand lui rétorque: "… les époques mémorables dont cette médaille consacre le souvenir n'appartiennent plus qu'à l'histoire... (les Belges) seront fiers de porter cette distinction parce qu'ils ont fait partie de ces immortelles phalanges qui ont promené l'étendard français dans toutes les capitales de l'Europe et qu'ils ont été acteurs dans ces luttes gigantesques que l'histoire redira à la postérité la plus reculée…"

Malgré tout, la Médaille de Sainte-Hélène conserva son prestige. Un jour qu'on demandait à un vieux grognard s'il n'eut pas préféré recevoir la Légion d'Honneur, il répondit: "La Légion d'Honneur, tout le monde est susceptible de la recevoir; la Médaille de Sainte-Hélène, seuls les anciens grognards peuvent se la voir octroyer."

Pour obtenir cette distinction, les anciens soldats devaient présenter des titres en règle prouvant qu'ils avaient effectivement servi dans la Grand Armée. En France, les requêtes pouvaient être adressées à la Chancellerie de la Légion d'Honneur, où les grognards parisiens pouvaient, à partir du 1er septembre, obtenir le bijou et un brevet sortant des presses de l'imprimerie Pascal:

 

MEDAILLE DE SAINTE-HELENE
Instituée par S. M. Napoléon III.
Napoléon I
A ses compagnons de gloire,
Sa dernière pensée.
Sainte-Hélène, le 5 mai 1821.

Le Grand Chancelier de l'Ordre Impérial de la Légion d'Honneur certifie que Monsieur ………………… ayant servi durant la période de 1792 à 1815 a reçu la Médaille de Sainte-Hélène.

 

Ce brevet était revêtu de la signature du Duc de Plaisance, Grand Chancelier et portait en relief le sceau de la Grande Chancellerie. Le couvercle de la boîte portait en relief l'aigle et l'inscription: "Aux compagnons de gloire de Napoléon I. Décret du 12 août 1857." Le bijou officiel provenait des ateliers de Barré, graveur des monnaies.

La première distribution officielle eut lieu à Paris le 15 août. Ce jour-là, à 1 heure, l'Empereur remit lui-même la Médaille à Jérôme Napoléon, au Maréchal Vaillant, Ministre de la Guerre, à l'Amiral Hamelin, Ministre de la Marine, au Maréchal Magnan, au Maréchal Pélissier, Duc de Malakoff, au Maréchal comte Baragay d'Hillier, Ornano, gouverneur des Invalides, ainsi qu'à bon nombre de généraux de division et de brigade, d'amiraux, de vice-amiraux et de contre-amiraux.

A la Chancellerie, les "anciens" faisaient la file, une file dans laquelle se côtoyaient de gros bourgeois et des ouvriers déguenillés. Certains se reconnaissaient alors qu'ils s'étaient perdus de vue depuis 1812 en Russie. Parmi tous ces hommes, il y avait un des plus jeunes médaillés français : il avait fait à 12 ans la campagne de 1815 comme tambour, en présentant l'acte de naissance de son frère de deux ans son aîné. Des ecclésiastiques furent également médaillés de Sainte Hélène : le pape Pie IX, comte Mastaï, qui en 1813 avait servi dans le premier escadron du premier régiment de gardes d'honneur, Mgr Prilly, évêque de Châlons, Monsieur Laroque, curé de Saint-Ambroise à Paris. L'Empereur donna l'ordre de faire droit aux prétentions des femmes qui avaient également été employées dans les armées impériales. Nous en retrouverons en Belgique.

Au 18 décembre, plus de 220.000 décorations ont été distribuées tant en France qu'à l'étranger.

En France, les décorés forment un corps distinct : en octobre 1857, Napoléon III en visite à Compiègnes se les fait présenter avec les autorités civiles et militaires. En juillet 1858, à Paris, des mesures sont prises pour empêcher la mendicité parmi eux.

En 1861, ils commencèrent à revendiquer une pension. En 1869, une loi votée sur proposition de Mr Glois Bizoin accorda 250f à 16.000 d'entre eux.

Mais les années passaient….Le nombre des anciens qui allaient le 15 août rendre hommage à leur Empereur au pied de la Colonne diminuait.

Le dernier médaillé français fut L. V. Baillot, mort le 9 avril 1898 à l'âge de 105 ans après avoir reçu la Légion d'honneur des mains du Président de la République Félix Faure.

Nous avons vu que cette décoration pouvait aussi être attribuée à l'étranger, où s'étaient formées bon nombre de sociétés de frères d'armes. Des bijoux furent envoyés en Hollande, en Pologne, en Allemagne, en Italie. En Belgique, les anciens militaires de la République et de l'Empire susceptibles de recevoir la Médaille doivent s'adresser au bourgmestre de leur commune et déposer entre ses mains les pièces à l'appui de leur demande: ainsi, à Mons, les Bourgmestre et Echevins donnent avis qu'il résulte du décret impérial du 15 août qu'une médaille commémorative est donnée à tous les militaires des armées de terre et de mer qui ont combattu sous les drapeaux français de 1792 à 1815. Ils préviennent en conséquence ceux des habitants de cette ville que la chose intéresse qu'ils doivent remettre au bureau militaire de l'administration communale les demandes qu'ils seraient disposés à adresser au gouvernement français à l'effet d'obtenir la médaille dont il s'agit. Chaque demande devra être accompagnée d'une copie certifiée des états de service des pétitionnaires (Mons, le 19 septembre 1857).

Une liste nominative des ayant-droits est adressée à l'autorité supérieure par chaque commune. La Légation de France à Bruxelles se charge de réclamer les brevets et les médailles au nom des bénéficiaires. En outre, l'Office des Correspondances fait paraître l'avis suivant dans plusieurs journaux: "L'Office des Correspondances, qui compte à Bruxelles plus de dix années d'exercice, vient de fonder à Paris un bureau spécial pour hâter à la vérification des titres à l'obtention de la médaille créée par l'Empereur en faveur des militaires qui ont servi de 1792 à 1815 inclusivement, sous les drapeaux français. L'administration de l'Office, s'empresse d'informer les ayant-droits qu'elle se charge, au prix le plus modéré, de la recherche et de la copie des états de service, de la rédaction des pétitions et des mémoires, ainsi que des démarches auprès des autorités compétentes et de tous renseignements nécessaires tant en Belgique qu'en France. L'Office, essentiellement belge, se rendra gratuitement utile aux anciens militaires dont l'indigence sera constatée. S'adresser en personne ou par lettre affranchie, 7 rue des Eperonniers à Bruuxelles".

Le Musée Royal de l'Armée possède quelques dossiers de médaillés belges. De ces dossiers, j'ai extrait les deux lettres qui suivent:

 

"A l'Empereur des Français à Paris.
Bruges, le 26 7bre 1857.
Sire!
J'ai l'honneur de vous adressée la conger ci-après et de vous priée de bien me donnée les médailles de Ste Hélène pour les services rendus à la Belgique et à la France.
Recevez, Sire!, les pression de mes civilités a le empressement en bien cordial ami.

P. J. Simon
Rue des pierres, 27
A Bruges.

 

 

Ne retrouve-t-on pas là le sans-gêne et la bonhomie de ces hommes pour qui l'Empereur était, quarante ans plus tôt, un père, un ami?

L'autre lettre est adressée au Ministre des Affaires Etrangères par le président de la Société des Anciens Frères d'Armes de Saint-Nicolas:

 

A Monsieur le Ministre des Affaires Erangères à Bruxelles.
Monsieur le Ministre,
En ma qualité de Président des anciens frères d'armes de l'Empire français, j'ai l'honneur de vous adresser ci-joint la liste dûment certifiée par Monsieur le Bourgmestre de cette ville désignant les noms des militaires qui ont obtenu la Médaille de Sainte-Hélène décernée par Napoléon III.
Je vous prie, Monsieur le Ministre, au nom de mes compagnons d'armes, de vouloir provoquer l'autorisation necessaire pour qu'ils puissent porter cette marque de distinction.
Agréez, Monsieur le Ministre, l'assurance de mon respect.

Le Président,
Hébert .
Saint-Nicolas-Waes, le 20 janvier 1858.

 

Les Belges devaient en effet, en application de la loi du 11 juillet 1832, obtenir l'autorisation de porter cette décoration étrangère en Belgique.

Les bourgmestres durent, par l'entremise des gouverneurs de provinces, faire parvenir les listes des médaillés belges de moralité notoire. Si leur demande était acceptée, les décorés recevaient en plus du brevet français, une autorisation ainsi libellée:

"Léopold, Roi des Belges.
A tous, présents et à venir, salut.
Vu la requête du sieur ……… demandant à être autorisé à porter la Médaille de Sainte-Hélène qui lui a été décernée par Sa Majesté l'Empereur des Français.
Vu l'article 9 de la loi du 11 juillet 1832.
Sur le rapport de notre Ministre des Affaires Etrangères,
Nous avons arrêté et arrêtons:
Art. 1: le sieur ……… est autorisé à porter la susdite médaille sans pouvoir la détacher du ruban.
Art. 2: notre Ministre des Affaires Etrangères est chargé de l'exécution du présent arrêté."

 
On peut admettre qu'environ 15.000 Belges reçurent cette autorisation. Des listes de médaillés (environ 14.162 noms, selon le général Couvreur) ont paru dans le Moniteur Belge des 23 janvier, 20 février, 18 mars et 27 avril 1858 et du 16 janvier 1859 (annexes A, B, C). 

Les décorations furent envoyées aux administrations communales qui les distribuèrent avec plus ou moins de fastes. A Ath, 51 décorations furent remises le 24 janvier 1858 à 3 heures en l'Hôtel de Ville. En février, ce fut au tour de Quevaucamp d'organiser la cérémonie de remise. Un vieux grognard y prononça ces paroles:

"Mes chers frères d'armes, Napoléon III, Empereur des Français, a eu la généreuse pensée de nous décorer de la Médaille de Sainte-Hélène. A ce sujet, nous lui témoignons notre reconnaissance; aussi, cela nous fait rappeler Napoléon I rempli de gloire, qui nous a tant de fois conduits à la victoire et fait remporter des lauriers. Son nom ne sera jamais oublié. Vive l'Empereur des Français! La Providence a voulu que, après avoir tant de foius bravé les balles, la mitraille, les bombes et les boulets, nous rentrions dans notre chère patrie, et nous avons juré fidélité à notre Roi et à notre drapeau. Frères d'armes et amis, pour le peu de temps que nous avons encore à vivre, restons unis."

Le 6 mars, 240 brevets arrivèrent à Tournai. Selon une note qui se trouve au musée du folklore de cette ville, il y aurait eu 214 médaillés. Il y en eut 48 à Alost, 9 à Hyon, 25 à Ghlin, une centaine à Mons, 5 à Saint-Symphorien et 14 à Nimy -Maisières.

Des cérémonies furent organisées à Froyenne par l'administration communale en présence du corps des sapeurs-pompiers (la distribution se fit sur une estrade surmontée du buste de Napoléon et de l'inscription: Honneur aux serviteurs du vieux empire et entourée d'étendards belges et français et de faisceaux de fusils et de lances provenant des armées impériales); un banquet fut offert par les fonctionnaires communaux et ce, le lundi de Pâques; et à Pipaix, le deuxième dimanche après Pâques.

Il y eut également beaucoup de décorés à Gand, où existait une association de frères d'armes.

A Lessines, les médailles furent remises le dimanche 18 avril à 11 heures. La Société Philharmonique, fondée en 1792, prêta son concours à cette manifestation qui nous est contée par un journal local, Le Postillon:

"La distribution des Médailles de Sainte-Hélène a eu lieu dimanche dernier. L'administration communale au grand complet, Monsieur le Juge de Paix et bon nombre de notabilités assistaient à cette cérémonie qui avait en outre attiré plusieurs centaines de curieux aux abords de l'Hôtel de Ville. La remise des médailles a eu lieu après une allocution de Monsieur le Bourgmestre Tacquenier. Les décorés sont au nombre de 24, parmi lesquels 7 pensionnaires de l'Hospice des vieillards. A 3 heures de relevée, Monsieur Laurent Vandenbranden, propriétaire et agriculteur, ancien sergent aux grenadiers de la garde, a réuni les décorés en un banquet chez le sieur Pierre Richet, "A la Bourse"; inutile de dire que ce banquet a été joyeux et animé au possible."

La veille, c'était A. J. Stalport, garde-champêtre à Papignies, qui avait été décoré.

De semblables cérémonies eurent lieu dans de nombreuses communes du pays. Des femmes ayant également réclamé la Médaille, Napoléon III ordonna de faire suite à leurs demandes, pour autant qu'elles pouvaient présenter des titres en règle.

"La Fourragère", n°7, 12ème série, en cite quelques unes de chez nous: Marie Somers, 70 ans, de Cruybeke, avait fait la guerre d'Espagne dans le 9° hussards, où elle avait servi pendant dix ans; Philippine Charlotiaux, veuve Bailly, 70 ans, de Namur, fut faite prisonnière étant vivandière à la 22ème batterie du 9° d'artillerie (campagne de Russie 1812); il faut citer aussi Sophie Timmermans et Anne-Thérèse Burniaux.

Le plus jeune décoré belge fut probablement Auguste-Joseph Dereume, né à Maestricht le 1 mars 1807 et admis comme enfant de troupe au 20° dragons le 6 décembre 1813.

Le dernier médaillé belge est sans doute François-Ange-Joseph Thiery, né à Tournai le 25 septembre 1797. Officier de santé dans la Grande Armée, prisonnier de guerre des Russes en 1814, licencié en avril 1814, il mourut à Haelen le 29 mars 1891. L'ancien lieutenant Ducaté Jh., de Courtrai, s'éteignit à l'âge de 99 ans à Zwynaerde (21 janvier 1890). Le major Van Goethem avait 98 ans, le capitaine d'Hongerswal, 97, le général Brialmont, 96, le général de Wautier, 95, le colonel Rosalani et le capitaine Matot, 93, le colonel Delport, 92.

La Médaille de Sainte-Hélène n'ayant pas été décernée à titre posthume, certains ne purent jamais la recevoir: PhilippeViseur, incorporé en 1808 au 23° de ligne, avait fait les campagnes d'Italie, d'Allemagne et de Prusse; il avait reçu trois blessures à Lutzen et Bautzen ; il rentra dans ses foyers après l'abdication de 1814 et fut enterré le 29 décembre 1857. D'autres furent momentanément oubliés, ainsi à Mons, l'huissier Godart, ex-sergent-major au 7° léger, 2° bataillon, 5° compagnie, qui, blessé à Eylau près du drapeau de son régiment le 8 février 1807, avait été amputé du bras droit à l'âge de 21 ans.

A la nouvelle du décret du 12 août, l'Athois Joseph-Théophile Larose, ancien pupille de la garde, dessina un encadrement imagé pour le brevet de la Médaille de Sainte-Hélène. On en trouvera une photo dans "La Fourragère3, n°1, 13ème série. J. Vandenhoff, fabricant de cadres, rue Cantersteen à Bruxelles, mettait en vente des cadres surmontés de l'aigle française.

  

Bibliographie et références.

Bulletin de la Société Belge d'Etudes Napoléoniennes, n° 22.
La Fourragère, 12° série, n° 8; 13° série, n° 1 et 2.
Vert et Rouge, n° 107 (1957).
Intermédiaire des chercheurs et des curieux, février 1966.
La Revue Nationale, janvier 1962.
Historia n° 119.
La Belgique militaire. (1900-1901).
La Médaille de Sainte-Hélène. Histoire et description, par N. Turquin. Arles 1858.
Médaille de Sainte-Hélène et de Waterloo. F. Rops.
Société Philianthropique des Anciens Frères d'Armes de l'Empire Français. Par F. de Keyser. (Société Le Vieux Papier, 1959).
Gloires militaires du Pays d'Ath. Par Monnier.
Capitaine Bottey: Vétérans, Débris, Frères d'Armas. (1900).
Histoire des Ordres de Chevalerie et des distinctions honorifiques en France (1868).
Dossiers des médaillés de Sainte-Hélène déposés aux Archives Générales du Royaume et au Musée Royal de l'Armée.
Archives du Moniteur Belge, et des journaux Le Postillon, La Gazette de Mons, Le Nouvelliste de Gand et Le Courrier de l'Escaut (1857-1858).

N. B.: Les archives françaises ont été détruites lors de l'incendie de la Grande Chancellerie de la Légion d'Honneur en 1871.